Ces indignés ordinaires qui compliquent la vie des autorités
Article source de Lamouette écrit par Henri Moreigne
Ce sera incontestablement le slogan de l'année 2011 : "Indignez-vous". Une indignation Hesselienne très contagieuse puisque même les Etats-Unis, patrie du capitalisme, voient se lever des citoyens ordinaires pour dire pacifiquement "non" à une société à la dérive. Face à eux, les autorités peinent à trouver une parade sans tomber dans certains cas dans la violence comme aux Etats-Unis ou dans des procès ridicules comme en France.
Les américains et les banques, c'est une longue histoire mais, trop c'est trop. Sitôt le risque de collapsus passé, les grandes banques sont reparties de plus belle dans la course à tous les excès notamment les golden salaires pour une poignée de dirigeants ou de cadres. Des avantages largement financés par des frais exorbitants de gestion imposés aux clients. Face à cette situation "intolérable" les cousins indignés américains ont trouvé une parade pour régler leurs comptes avec les grands établissements financiers.
Pragmatiques, ils ont donc décidé d'attaquer là où ça fait mal. Des dizaines de milliers d'individus ont tout simplement décidé de clôturer leurs comptes dans les banques commerciales et d'aller voir ailleurs, de préférence des banques mutualistes et coopératives. Le 5 novembre dernier avait ainsi lieu le "Bank Transfert Day" (Journée du transfert de banque). Pour le seul mois d'octobre, plus de 650 000 comptes ont été ouverts, dans des banques coopératives censées donner la priorité au consommateur, et non à l'actionnaire et offrir des services bancaires moins chers. Seul bémol, elles offrent généralement moins de services.
Paradoxalement, les banques commerciales ne sont pas mécontentes de perdre leurs clients moins fortunés, car depuis les nouvelles régulations fédérales comme celle plafonnant les frais liés aux découverts bancaires, ces clients sont moins rentables pour les banques. Mais peu importe, l'important est de prouver que tout un chacun détient une part du levier pour bousculer le système.
Autre exemple : le mouvement Occupy Wall Street (OWS) démarré le 15 septembre et qui suscite la polémique en raison des violences policières qui émaillent la gestion des manifestations.
Le 4 novembre dernier, en Californie, une journée de mobilisation dégénére avec le saccage des commerces du centre ville et une confrontation avec la police. Bilan : 80 arrestations et 8 blessés dont un vétéran de la guerre d’Irak qui se retrouve hospitalisé avec la rate perforée après être passé entre les mains de la police malgré son absence d'agressivité.
Le 17 novembre, ce sont 30 000 personnes qui manifestent à New York, quelques jours après avoir été délogée par la police de Zuccotti Park, à deux pas de Wall Street. Parallélement, le mouvement s'étendait à 30 grandes villes américaines.
"Les 99%" comme ils s'appellent, en opposition au 1% de la population la plus fortuné qui détient un tiers de la richesse nationale, n'entend pas baisser les bras. Les violences policières perpétrées à leur encontre, qui tournent en boucle sur le web, les renforcent un peu plus dans leur détermination à poursuivre le bras de fer avec les autorités.
En France, autre lieu, autres mœurs. Patricia Jolly dans Le Monde relatait début novembre la convocation le 31 octobre dernier de neuf indignés devant la 29e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris pour avoir, très précisément, « décollé », en s'y appuyant, le haut d'une vitre d'un fourgon de police.
Les faits remontent au 21 septembre quand des indignés français organisent un sit-in, place de la Bourse. En fin d'après-midi, quatre-vingt-onze personnes sont interpellées. A l'intérieur des camions de police, avec nos doigts collés aux vitres, on formait des coeurs car c'est le symbole de la paix. Puis le camion a démarré, un camarade a perdu l'équilibre et s'est appuyé à la vitre qui s'est un peu décollée explique l'une des manifestantes.
Résultat onze personnes renvoyées devant le tribunal correctionnel et une procureure qui va jusqu'à requérir trois mois de prison ferme contre une indignée déjà condamnée quatre fois pour conduite en état d'ivresse et violences. Pour chacun des dix autres prévenus au casier vierge, la représentante du ministère publique demande 500 euros d'amende.
Le jugement a été rendu le 14 novembre. Tous les prévenus ont été relaxés.